A Strasbourg, en MARs, tournent les Giboulées
de la MARionnette depuis vingt-cinq ans. Des mains invisibles recréent nos cœurs d’enfants
quand de la nuit les fées réconfortent Orphée.
Pied à pied, en papier,
vont les Argonautes sur le temps et l’espace :
par le Théâtre de l’Evasion dont Théâme visita les images déjà, qui nous invite au voyage et qui délivre la réparation,
plus cher que la Toison d’or le chant fait la place…
Car Orphée chasse les dangers et les monstres prêts à manger.
Mais, dans la campagne, la tristesse gagne.
Où donc s’envole parmi les oiseaux
la belle Eurydice ? Quel maudit caprice
aux noces l’enlève d’un saut ?
Les larmes sont une tempête pire que la mer démontée ou les vampires…
Mais EuryDice renaît du serpent, elle dont le nom est Vaste-Justice : la voix d’Orphée aux enfers la reprend,
car l’art sait transformer les maléfices
en éternel accord
pour humer les brises à plusieurs reprises,
pour traverser la mort.
Ainsi Virgile aux Géorgiques ajouta ces sons magnifiques :
Illa : “Quis et me, inquit, miseram, et te perdidit, Orpheu,
Quis tantus furor ? En iterum crudelia retro
Fata uocant conditque natantia lumina somnus.
Iamque uale : feror ingenti circumdata nocte
Inualidasque tibi tendens, heu ! non tua, palmas.”
(Géorgiques, Livre IV, vers 494-498.)
Pour ces hexamètres fameux, Théâme voudrait proposer une version qui rende compte de certaines particularités sinon rythmiques, du moins expressives, comme la dislocation syntaxique esquissant le chaos de la disparition, comme la résonance ici tragique de l’adieu latin “Vale” enjoignant “Porte-toi bien”, ou comme les suggestions marines du flou visuel, puis des paumes qui se dissolvent en vaines palmes, voire en rames inertes.
