
Jamais la grâce ne se harasse !
Dès le dialogue de Platon Phèdre, l’idée est l’invisible qui guide l’œil intérieur et ne demande qu’à devenir visible par nos réalisations partant de nombreuses sensations vers une globale compréhension (240 c, traduction proposée par Théâme) : par lui, le livre soudain se livre comme la monture de toute aventure, comme un cheval souple, idéal…

Encore faut-il quelques déclics pour que, dans le soleil, le public ne soit plus apathique foule ni non plus un cynique moule !

Dès lors, dans la nuit prend forme une énergie quand les ailes et les antennes d’un attelage, comme des rênes, sont entre les mains d’un cocher qui sait où le faire marcher (246 a, transposition par Théâme), même s’il erre par mers et terres, cherchant un abri entre crainte et cri !

Dans Gorgias ou de la rhétorique, Socrate déclare d’ailleurs que l’art de la législation est à l’âme du citoyen ce que la gymnastique est à son corps, que la justice guérit son être intérieur comme la médecine rétablit ses organes physiques, enfin que la rhétorique peut corrompre l’âme comme la cuisine risque de gâter le corps (proposition de Théâme pour la synthèse de 464 b – 465 a). De même, à l’issue de Phèdre ou de la beauté, le vrai discours s’écrit tout au fond de l’esprit (276 a) qui s’initie et remercie… Alors la mort semble être en fuite devant la suite !

Les vers de Martine Blanché sont clairs sans jamais s’épancher : quand l’une après l’autre les pages s’allument,
Un cheval de bois se fige dans la brume
pour mieux unir les arts en un vivant regard !

Car la poésie sait réveiller la lyre dans le ciel d’Apollon, dissipant les délires.

Vous êtes invités : voudrez-vous accepter d’entamer ce voyage vers la joie dont la préface vous présente quelques voies ?
″ Déjà Victor Hugo le savait dans ses Contemplations en écoutant Ce que dit la bouche d’ombre : « Tout vit ! / Tout est plein d’âmes. ».
Ainsi La Source nous met « L’écho du cœur dans l’oreille »
jusqu’à ce qu’Entre deux portes nous puissions
« entrevoir dans l’obscurité profonde / Les bienfaits éternels de la Miséricorde. »
Alors, dans Souvenirs, même « Le mur est d’or le soir au bord de la Spree » : elle qui a vu tourner de W. Wenders Les Ailes du désir (donc « Le ciel au-dessus de Berlin ») peut nous ouvrir le Jour de crépuscule où
« L’ange se cache derrière l’armure du luth » et « L’ange vacille au royaume des ombres »,
puisque, d’après Tour de nuit à N.Y.C., « Rien ne s’éteint ».
Des fresques dantesques font déboucher les soirs sur de radieux espoirs. Mais il faut lier les cordes de la lyre et lire, en continu comme on respire, les pages de Martine Blanché qui résistent à tous les clichés, où la poésie fait vibrer la vie de même qu’une droite est infinie. Il est temps de s’en aller joyeux sous de fidèles et nouveaux cieux ; car le seul rôle de cette humble préface est de faire place à l’art, son rythme et sa face. ″

C’est qu’il s’agit toujours de déclarer la paix à travers les lignes qui nous parlent tout près, pour que nos nefs gardent le cap sur l’espérance, pour que soit moins idéal, mais plus réel, le cheval, et pour qu’en rencontres se transforme l’errance.
