
I. M. Jean-Pierre Bohn.
En cette Epiphanie, que de pluie, d’avanies, que de faux contacts, d’obstacles compacts ! Quel était donc ce prélude dont le noir encore exsude ?

Jusqu’où faut-il monter, en cette nuit déferlant vers le baptême du Christ, vers la voix et les ailes du ciel même, pour toucher la bonté ?

Mais, soudain, le souffle et la terre paraissent suspendre les guerres.

Dans le calme et la paix, la recherche se tait : la plénitude vient à l’étude.

Notre devoir est bien de voir…

…D’écouter à longue portée pour chanter à pleine gorgée : Jean-Pierre transfigurait en tuyaux d’orgue l’arrêt ! De l’Esprit l’on voyait jaillir la mélodie, changeant nos pauvres vies en harmonie…

…Pour que le jeu garde le feu, pour que la maladie incurable nous tienne un langage délectable, pour que le don crée l’unisson,..

…Et que la becquée se trouve comme l’amitié se prouve.

Ainsi, de l’éternelle guérison s’ouvre à nous le fraternel horizon, tel un espace où l’accord passe… Comment se fait-il donc qu’au-delà de la mort le cadeau de Jean-Pierre et de sa douce épouse me soit parvenu dans la lointaine Mulhouse, comme une visite – mieux : comme un appel fort ? Je ne peux que, par reconnaissance, aller célébrer cette naissance au ciel, bien que privée des improvisations humbles et grandioses que sans doute il ose faire entendre là-haut, en pleine communion, Que tout entière l’accueille la lumière, dans ses vrais contacts sans nul artéfact !

Un organiste s’en est allé faire jouer le vent dans ses tuyaux de l’autre côté des choses. Juste avant le déchirement de la vie, juste avant de perdre contact avec le Vent de vivre, juste avant son dernier souffle, il joue à pigeon-vole avec « l’œil déchiré » de Sylvie Lander. Alors d’où vient-il ce cadeau merveilleux, du ciel ou de la terre ? Et d’où vient la fauvette, le bel encorbellement de son corps sur un balcon de Pierrefontaine ? Et si tout était signe, et si tout cherchait le ténu contact entre visible et invisible? Le lien se fait comme quand on branche une prise entre un frêle arbuste rouge et le bois solide des poutres pour bâtir les parois ajourées d’un abri presque sans mur. Laisser du vide avec le plein, éviter de construire un mur opaque qui détruirait le vent. Ainsi la vie reste passante, les passants que nous sommes restent des « apprenants ». Au-dessus des alvéoles closes du Learning Center, le ciel court encore comme un furet. Les murs peints ne sont plus des clôtures, mais des envols. Peindre, c’est délier la relation, c’est faire que se touchent avec un tact infini le réel et l’irréel. Alors, grâce à ce délicat toucher de l’âme que lui donne le symbole et qui est un saint apprentissage, l’esprit saisit une Vérité cachée depuis le commencement du monde et peut entendre cet étrange Parole liée au Fils de l’Homme. La comprendre. En recevoir le divin contact. La brancher à soi par l’Esprit. L’Agneau immolé, c’est lui, l’Agneau vainqueur. Alors le ciel se déchire, alors la Vie peut vaincre la mort.